Retour à Téhéran ! Quelques formalités à l’ambassade Turkmène puis on reprend nos fidèles montures Shotor1 et Shalveg2 (oui, ça y’est, on les a baptisés !) pour rouler une petite semaine vers la frontière Turkmène. L’occasion de se faire une meilleure idée de ce qu’est le vélo en Iran dans une partie beaucoup moins touristique : Le nord-est du pays.

1Chameau en farsi. Fidèle compagnon des caravaniers, nonchalant et increvable, lentement mais sûrement !

2Chanson géorgienne favorite d’Edouard, souvenir de grands moments et surtout un fier et valeureux guerrier géorgien !


Après Ispahan et 10 jours de visite sans nos vélos, on rentre à Téhéran ! C’est la première fois que l’on repasse dans un endroit une seconde fois et en marchant à 5h du matin vers l’appartement de Saied et Nazi on a un vrai sentiment de retour à la maison ! On est finalement tout content de revenir à Téhéran, on l’a critiqué cette ville : trop bruyante, trop grande, trop polluée, trop de monde ! Mais finalement on s’y est bien attaché. Il est vrai que cette ville est fascinante. D’ailleurs si vous souhaitez avoir un aperçu de la ville et de la société iranienne n’hésitez pas à vous plonger dans le livre « Vivre et mentir à Téhéran ». Un recueil de petites histoires vécues qui permet de se plonger au cœur des différentes strates de la société iranienne.


On est également vraiment content de revoir Saied et Nazi ! D’autant plus que par pur hasard, un autre cycliste est venu trouver refuge dans leur appartement en notre absence et il s’agit de notre ami Elias, l’espagnol que nous avons rencontré sur les routes d’Arménie ! Le retour à Téhéran signifie aussi la réponse tant attendu pour le visa turkmène. Ce visa qui ouvre les portes de l’Asie centrale est vraiment la bête noire de tous les cyclistes et autres voyageurs au long cours. Pas vraiment de règles claires mais environ 50% de refus. Une vraie loterie ! Il arrive même que dans un couple l’un soit accepté, l’autre non. Ne pas avoir le visa signifie repartir en arrière vers l’Azerbaïdjan, prendre un bateau pour traverser la caspienne avec des horaires plus qu’aléatoire (parfois plus d’une semaine d’attente !) puis traverser le Kazakhstan pour enfin rejoindre l’Ouzbékistan. Une autre solution est bien entendu de prendre l’avion mais c’est cher et pas tellement dans la philosophie du voyage. Bref, on stress et on espère bien faire partie des chanceux ! On attend l’ouverture de l’ambassade à 9h avant d’appeler mais c’est sans cesse occupé. On finit par avoir quelqu’un vers 10H qui nous dit de rappeler après 11H…le suspense est à son comble. A 11H30, on a la réponse...............c’est bon pour nos Visas ! Youhouuuuuuuh !!!! Autant vous dire qu’on est franchement heureux, presque plus qu’à l’arrivée d’un col après 3h de montée en Arménie, c’est vous dire !


On part de l’ambassade le lendemain avec un grand sourire, c’est bon, en moins de 5 minutes c’est plié on a le droit à nos 5 jours au Turkménistan ! On profite de nos deux derniers jours à Téhéran pour bien se reposer, profiter de Saeid, Nazi et Elias, se balader un peu dans la ville (enfin faire la sieste dans les parcs !). L’ambiance est très animée à Téhéran à deux jours des élections présidentielles. Ces élections sont hyper importantes pour les iraniens. Globalement s’affronte le président actuel Rohani plutôt modéré, largement soutenu par la jeunesse iranienne et à vrai dire par l’ensemble des iraniens que nous avons rencontré. Son adversaire principal Rezi, soutenu par les autorités religieuses, est ultra conservateur et signifierait un vrai retour en arrière pour les iraniens. On sent Saied et Nazi de plus en plus stressé à l’approche de ces élections, ça nous touche beaucoup. Quoi qu’il en soit on voit partout dans les rues des jeunes et moins jeunes habillés aux couleurs du Rohanni (vert et violet), brandissant pancarte et scandant des slogans. C’est une ambiance très bon enfant, tout le monde se parle et est heureux. Néanmoins, Elias aura une mauvaise expérience avec la police religieuse iranienne alors qu’il filmait avec son portable un attroupement. Heureusement, en effaçant tout de suite la vidéo et en montrant qu’il est un simple touriste, il s’en sort sans problème. Néanmoins ça permet de rappeler que l’Iran reste un pays où les libertés sont bien restreintes, ce qu’il est très facile d’oublier quand on est un simple touriste tant les gens sont heureux et ouverts. Bref, Rohani a intérêt à gagner et largement !!

Le séjour à Téhéran sera également l’occasion de fêter l’anniversaire de Cécile en compagnie de nos camarades ainsi que des parents et du frère de Saeid. Couché 4H du mat’ (en Iran on passe rarement à table avant minuit !!) et levé 7H30 pour aller prendre notre bus pour Gonbad-e-Kavus (heureusement 8h de bus, on va pouvoir dormir !). Nous sommes le 18 mai, il nous reste 8 jours de Visa et nous avons donc décidé de prendre un bus pour nous rapprocher de la frontière puis rouler jusqu’au Turkménistan !


Une belle dernière soirée en compagnie de Nazi, Elias et Saied avant de quitter Téhéran


Quand on arrive à Gonbad, on est direct dans l’ambiance, ça fait plaisir de retrouver nos vélos et tout le monde est intrigué par notre matériel et nous regarde calmement installer nos sacoches. On se met tranquillement en route et tout de suite, des voitures s’arrêtent sur la bande d’arrêt d’urgence pour pouvoir discuter rapidement avec nous, nous donner des friandises, prendre un selfie ou encore nous inviter à passer la nuit chez eux ! C’est hallucinant ! Comme on est bien fatigué, on décide de camper pour pouvoir se reposer un peu. On s’éloigne de la route pour se poser dans le jardin d’une école entourée de champs de blé et on monte la tente pour la première fois en Iran ! A peine la tente montée, un couple arrive pour nous inviter à passer la nuit chez eux ! On refuse, on a vraiment besoin de dormir et puis on a déjà installé le bivouac!


Le lendemain, avant de partir Edouard décide de resserrer les rayons de sa roue arrière qu’il a trouvé un peu détendus. Et là, c’est le drame ! Edouard se rend compte que sa roue est complètement voilée, à resserrer les rayons n’importe comment, voilà ce qui arrive! ça nous prendra 50 minutes pour dévoiler la roue pendant lesquels de nombreux passants s’arrêteront et ce qui permettra à l’agriculteur d’à côté de nous offrir aussi une dizaine de concombres en plus des kilos de courgettes offerts alors qu’on démontait la tente !



Et comme le dit un fin philosophe français: "qui ne tente rien n'a rien" / "c'est en tombant qu'on progresse" / "y'a que ce qui ne font rien qui ne rate rien" ou encore, "c'est en faisant qu'on apprend"! Bref pour conclure, on avait bien raison de tenter une réparation hasardeuse au milieu de nulle part!


Le nord-est du pays n’est pas trop désertique, après les rizières proches de la mer caspienne, on y trouve des très vastes champs de blé et autres cultures de légumes ou vergers. C’est vraiment sympa de se balader dans ces petits villages qui voient peu de touristes et où les gens sont incroyablement accueillant. Pendant notre deuxième jour de ce « petit » trajet à vélo, on décide de faire notre pause déjeuner dans un petit village. Il fait une chaleur suffocante et la recherche non-fructueuse d’une zone d’ombre appropriée nous emmène dans une famille très sympathique avec de nombreux enfants. Ils nous offrirons de manger seuls au calme dans le salon de leur maison et on sortira la guitare pour distraire les enfants jusqu’à ce que la grand-mère nous rende l’harmonica dans lequel un enfant soufflait à tue-tête en me disant avec sympathie « haram » (c’est-à-dire impur, ce qui est interdit. Oups !). Le soir, on s’arrête à tang rah, où Samhat (un Iranien rencontré sur la route) nous a gentiment proposé de dormir tandis que lui retourne à Gonbad pour voter. Car aujourd’hui c’est jour d’élection ! Nous sommes tendus et excités à l’idée de connaitre les résultats. On reste scotché à la télé et sommes vraiment impressionné par le nombre de gens qui vont voter. La fermeture des bureaux de votes sera même retardée de 3h ! Finalement nous n’aurons pas les résultats définitifs : Rohani a largement remporté les suffrages ! Nous sommes vraiment heureux pour l’Iran !


Le jour suivant, la route continue dans le parc naturel du Golestan. C’est un peu la jungle et nous apercevons dès le début un sanglier peu farouche sur le bord de la route. Quelques kilomètres plus loin, ce n’est pas deux sangliers mais bien deux cyclistes Français sur le départ de leur bivouac que nous rencontrons ! Isaure et Boris sont partis il y a maintenant 8 mois du sud-est de la France et ils sont sur le trajet de Mashhad où ils espèrent récupérer leur visa Turkmène. C’est trop cool d’avoir des amis avec qui rouler, on discute beaucoup sur les larges routes Iraniennes et les kilomètres défilent vite ! Un iranien nous propose de dormir chez lui dans un petit village « proche » de la route. Mais après 15 km dont 5 bons kilomètres de mauvaise piste, nous abandonnons, le soleil se couche et nous sommes trop fatigués, nous posons donc la tente sur un petit coin d’herbe à proximité de la piste.


Isaure et Boris, deux cyclistes aguerris qui nous notamment ont bien mis la pâté avec leur matos: ils transportent même deux chaises sur leur vélo pour des bivouacs 4 étoiles!


Nous quittons Isaure et Boris le lendemain midi (ils roulent depuis près de deux semaines et s’accordent une journée de pause bien méritée chez un warmshower) pour continuer notre route qui est devenue une autoroute entourée de montagnes désertiques. Le soir, à la recherche d’un bivouac, nous apercevons quelques arbres et c’est Mohammed qui nous accueille dans son verger. La barrière de la langue est parfois un peu difficile mais Mohammed est d’un accueil incroyable. Etonnés, nous comprenons qu’il souhaite dormir dans sa voiture à proximité du verger pour éviter qu’il nous arrive quelque chose. Malgré notre insistance pour l’en dissuader, nous n’arriverons pas à l’en faire démordre et nous dormirons avec un gardien de bivouac dans le verger !


Au réveil, Mohammed nous accueille avec un thé tout chaud et nous emmène cueillir de délicieuse cerises dans son verger. La suite de la route est un peu monotone mais la traversée de Borjund révèlera quelques surprises ! Tout d’abord Manouch (visage de lune) qui nous invite dans son restaurant pour déguster un délicieux kebab accompagné de riz blanc (Chelo kebab). Puis le propriétaire du magasin Giant ouvrira ses portes rien que pour nous ! L’occasion d’acheter un compteur de kilomètres neuf pour Cécile (le drame de la veille, c’est un tel plaisir de voir les kilomètres défilés sur le compteur et pouvoir crâner sur le blog avec nos stats !), de faire la pression des pneus et même quelques réglages. Nous repartons de cette ville enchantés de l’accueil des Iraniens et reprenons notre autoroute désertique. La recherche de bivouac devient compliquée (pas vraiment de zones abritées de la route) et nous décidons d’aller frapper à la porte d’un centre du croissant rouge (équivalent de la croix rouge). On apprendra d’ailleurs plus tard que globalement les centres du croissant rouge sont des plans bivouacs bien connu des cyclistes en Iran ! C’est 5 jeunes gars nous accueillent (Mehdi, Mhossein, Hossein, Hossein et Hossein !). Nous passons une excellente soirée avec eux. Ils partagent leur repas et nous jouons aux petits chevaux. Ils sont à la fois très religieux et super ouverts d’esprit. Ils lanceront un bol d’eau à notre départ le lendemain que nous interpréterons comme un « bon vent » à l’Iranienne.


Medhi, Hossein, Mhossein, Hossein et Hossein! Merci pour l'accueil!


Après un bivouac dans un parc Iranien à Faruj, on se rapproche de la frontière et nous quittons enfin l’autoroute pour s’enfoncer dans les montagnes vers Bajgiran. Quel plaisir de retrouver les petites routes et les paysages montagneux magnifiques après deux jours d’autoroute toute plate avec vent de face bien entendu ! Le temps d’un dernier bivouac au milieu des champs de coquelicot et nous arrivons à la ville frontalière. Une dernière nuit dans le parc de la ville avant de passer la frontière et de quitter le sol Iranien avec un sentiment d’excitation mêlé de tristesse : Hâte de voir ce qu’il y a de l’autre côté mais on aurait bien profité un peu plus longtemps de nos sympathiques amis Iraniens et leur magnifique pays !


Et pour le reste des photos c'est pas là, c'est par ICI!