Turkmenistan : pays totalement fermé au tourisme, pays dont on ne sait rien si ce n’est que le président est mégalo et que nous avons uniquement 5 jours pour traverser plus de 600km de désert ! Au final une expérience rapide mais chouette même si on va vite abandonner l’idée d’une traversée à vélo !


On arrive relativement tôt au poste de frontière avec un petit nœud au ventre. C’est toujours triste de quitter un pays que l’on a aimé et où l’on aurait bien passé plus de temps. Et puis arriver dans un nouveau pays c’est appréhender une nouvelle culture, réadapter son mode de vie, réapprendre les gestes du quotidien : ça se passe comment les bivouacs là-bas ? C’est facile de trouver de l’eau ? Est-ce que les gens sont sympas ?! D’autant plus qu’on n’a pas eu accès à internet pendant plus d’une semaine ce qu’on n’avait pas trop anticipé et du coup on n’a absolument rien préparé, rien lu sur le Turkménistan !


Le passage de la frontière iranienne passe rapidement, les douaniers n’ont pas l’air d’être aussi émus que nous de nous voir quitter le pays ! Au Turkménistan on est immédiatement accueilli par une photo géante du président. On ne nous avait pas menti !! Les douaniers ont l’air extrêmement jeunes et peu commodes au premier abord. Mais finalement, lentement mais sûrement après avoir après payé les droits d’entrée en dollars (et oui en plus du visa, il faut payer pour rentrer..), passé les bagages aux rayons X et subit une fouille rapide des bagages (les douaniers étaient très intrigués par la pâte de fruit plate iranienne, ils croyaient que c’était de la drogue et ont gouté pour vérifier ! Système de dépistage imbattable !) on rentre au Turkménistan !


Simple signalisation pour marquer l'entree d'Aschgabat!


Un militaire nous accompagne de l’autre côté de la frontière et nous fait comprendre qu’il est impossible de descendre jusque Asgabat à vélo et que nous devons emprunter un bus pour parcourir les 30km jusqu’aux abords de la ville. On est hyper déçu 1200m de dénivelé négatif qui nous passent sous le nez ! On essaie de négocier mais le militaire commence à s’impatienter donc on fait très vite profil bas et n’insistons pas. Sur la route c’est une torture de regarder par la fenêtre. Les paysages sont sublimes, montagnes vertes et des dizaines de chamois qui caracolent à deux pas de la route ! On nous laisse finalement descendre au bout des 30 kilomètres prévus, il semble qu’il s’agissait d’un immense no man’s land avec seulement quelques voitures autorisées pouvant faire le trajet jusqu’à la frontière. Heureusement il nous reste 10 petits kilomètres de descente avant la ville et nous avons l’honneur de pouvoir passer sous la grande porte d’Ashgabat et découvrir petit à petit cette ville complètement délirante. On va y aller point par point !


  • Les routes : des deux fois trois voies partout ! Complétement démesuré, il n’y a pas une voiture ! Pour être honnête, à vélo on est bien content : pas de voitures, de la place et surtout un asphalte plus doux que la peau d’une pêche (et oui après 3 mois à vélo on apprend à souhaiter, à bénir, à aimer l’asphalte !). Les quelques voitures qu’on croise sont toutes flambantes neuves. Il semble qu’il y ai des règles drastiques sur les voitures, à la frontière on avait en effet repérer un document officiel spécifiant l’interdiction d’importer des voitures anciennes et obligation de nettoyer sa voiture sous peine d'amende.
  • Seconde image de la ville : des immenses bâtiments tous de marbre blanc et d’or, très peu dense, aucune affiche, aucune devanture de magasins, aucun étalage et pratiquement personne dans la rue ce qui crée une ambiance complètement surréaliste.
  • Les monuments officiels et il y en a pléthore ! Cela va des sculptures au centre de rond-point à des grand monuments célébrant l’indépendance, la neutralité, le président. En tout on ne verra pas moins de 5 statues en or du président et pas sûr qu’on les ait toutes vues ! La plupart des monuments sont au milieu de grands parcs déserts, parfaitement entretenus et où de grandes fontaines s’écoulent bien que l’on soit aux portes du désert et qu’il fasse déjà une chaleur étouffante.
  • La taille de la ville. C’est gigantesque !! Au total on parcourera presque 30 km dans la ville juste pour faire le tour des principaux monuments puis chercher notre hôtel.
  • Les tenues des femmes. Les tchadors noir, nombreux en Iran, laissent place à des robes longues très colorés et fleuries avec foulards assortis savamment arrangés en turban. Pas de règles vestimentaires pour les femmes cependant et si beaucoup portent la tenue traditionnelle, certaines n’hésitent pas à abhorrer mini jupe et décolleté, carrément un choc après l’Iran !


Les statues en or de l'ancien president font partie integrante du decor de la ville !


Notre première véritable découverte de la ville sera un immense centre commercial recommandé pour son abondance de produits occidentaux. Là c’est le choc, il y a plein de mondes, c’est ultra vivant. Il faut avouer qu’on a carrément visité le supermarché du mall tout excité de découvrir tant d’abondance et de produits occidentaux puis qu’on s’est rué sur le food court du mall pour manger un énorme burger ! Mais au bout de 30minutes l’ambiance de surconsommation qui nous a séduite car rappelé notre patrie tant aimé nous lasse vite et on reprend la route à la recherche d’un endroit où dormir. L’occasion de longer un espèce d’immense parc olympique qui a été construit pour les jeux olympiques asiatiques indoor qui ont lieux cette année à Ashgabat. On retiendra notamment la tête de cheval monumental qui orne le stade principal dans l’ensemble sportif et les lampadaires/têtes de cheval qui bordent la route. Les chevaux turkmènes sont effectivement mondialement réputés ce dont ils ne sont pas peu fiers ! On découvre ensuite enfin le cœur de la ville, un peu moins aseptisé et surtout avec du monde dans les rues !


On avait repéré un plan pour camper dans le jardin d’un hôtel, mais visiblement ce n’est plus possible. L’hôtel de luxe (150$ la nuit) dans lequel le plan avait été partagé nous indique un autre hôtel, un peu excentré où l’hôtesse nous montre une chambre complètement délabrée (la porte ferme à peine et la salle de bain est limite insalubre) à 30$ la nuit. On oublie, c’est deux fois plus cher que tout ce qu’on a pu payer jusqu’à maintenant et vraiment sordide. On se dirige vers un troisième hotel, dayhhat, indiqué dans le lonely planet et ou la chambre n’est pas beaucoup mieux mais au moins c’est propre…On en a marre de chercher et on nous avait prévenu, comme il n’y a pas vraiment de tourisme au Turkménistan il y a très peu d’hôtel et par conséquent les prix sont très élevés. On paiera donc 40$, après un échec total de notre tentative de négociation !


On part se balader du côté du palais présidentiel mais les militaires (il y a un militaire en poste devant chaque bâtiment de la ville !) nous font vite signe de ne pas prendre de photos et de s’en aller. Heureusement, sur le chemin du retour on tombe sur un petit bar avec terrasse ombragée et surtout des bières. Grand moment de bonheur après notre mois d’abstinence forcé en Iran !

Le lendemain, avant de quitter la ville on passe faire un petit tour à la banque où on nous fait passer devant tout le monde (on est gêné mais bien content il y avait au moins 2h d’attente !) pour récupérer des dollars à la banque (c’est beaucoup plus dur en Ouzbekistan). La banque est un édifice encore une fois, monumental, ou la succession de guichets numérotés fait un peu penser aux douze travaux d’Asterix. Ce sera également l’occasion de discuter avec des turkmènes parlant très bien anglais et super accueillants.


On repart donc lourd de quelques centaines de dollars direction le désert Turkmène. Au début ça passe, c’est d’abord la traversée de villages animés où l’on trouve des petits bazars, des gens dans la rue, bref de la vie ! Et puis il n’est pas encore midi, la route est bonne et le vent n’est pas trop fort. Il faut dire que le Turkménistan est bien connu des cyclistes : 500km de désert au plus court avec un vent de face continue. Cependant après la pause déj, ça se complique ! On crève de chaud sous un soleil de plomb et la monotonie de la route désertique nous fait vite nous arrêter sur le bas-côté pour faire du stop. Notre choix de passer la frontière au niveau d’Aschgabat nous rajoute plus de 100 km (soit 600km à parcourir en 4 jours après la journée passée dans la capitale) et on sait que de toute façon on devra abandonner à un moment. C’est d’abord un camion/pickup qui nous ramasse sur le bord de la route. L’engin chinois est carrément vieillot, ce qui oblige le conducteur à faire des détours sur la route pour trouver de l’eau afin de remplir le réservoir de liquide de refroidissement et arroser son radiateur. Ce premier conducteur nous arrêtera finalement au milieu de nulle part où on décide de retenter notre chance pour aller un peu plus loin. Cette fois-ci c’est Marti qui s’arrête avec son gros camion-benne. Assez dubitatif sur notre capacité à charger les vélos dans son camion, on finira par réussi à les hisser au-dessus du bord de la benne à 3 m de haut et à monter dans son camion direction Kahka. On essaie de parler un peu mais notre méconnaissance du russe l’entraine finalement à mettre un film d’action à l’américaine doublé en russe. Avec le son à fond on roule une petite heure pour arriver dans la petite ville de Kahka.


Petite pause refroidissement du moteur!


On fonce à la gare, l’objectif est de tenter de prendre un train pour Mary afin de passer la nuit là-bas pour visiter le lendemain. L’hôtesse de la gare et les habitants sont super sympas, ils sont surpris de nous voir là et on est un peu l’attraction de la soirée. L’hôtesse de la gare nous dit que le train est à 20H30 et qu’il arrivera à Mary à 22H30. Le train arrive, on monte les vélos, on paye le contrôleur et vers 22H30 on se rend compte qu’on est pas du tout à Mary mais bien avant ! On en parle au contrôleur qui nous dit que le train arrivera à 2H du mat’ à Mary…Fatigués (on n’a pratiquement pas dormi la nuit précédente à cause de la chaleur) et peu motivés par la perspective de se taper une recherche d’hôtel en pleine nuit, on prend la lourde décision de prolonger notre trajet en train jusque Turkmenabat. Une décision qu’on regrette beaucoup…5 jours au Turkménistan et un visa chèrement acquis et bon au matin du 4ème on est déjà à la frontière Ouzbék…c’est vraiment dommage. On se dit qu’on aurait dû s’arrêter à Mary et continuer en stop comme prévu initialement mais la fatigue nous a fait prendre la solution de facilité...dommage.


Petit craquage apres une journee bien fatiguante!


On ne se laisse pas abattre et on trouve un hôtel très sympa à Turkmenabat, le salon a cote de la chambre a l’air conditionné et c’est un luxe incroyable dans ce pays où on crève de chaud. La ville n’a cependant rien d’extraordinaire et on la visite très rapidement, d’autant que la chaleur est difficilement supportable, que nous sommes dimanche et les quelques musées sont fermés. Du coup on se repose, enfin on passe la journée à dormir, manger et bouquiner assis sous la clim ! On rencontre un couple de touristes hollandais qui nous font part de leur expérience à Mary. Visiblement la ville, du même genre que Turkmenabat, n’était pas très intéressante ce qui nous soulage un peu de cette traversée expresse du Turkménistan. Quelques cyclos croisés par la suite et qui ont parcouru les 500km à vélo (mais quel courage !!) nous confirment que la traversée est bien difficile et vraiment monotone.


On a meme finit par deplacer les matelas sous la seule clim de l'hotel!


Le lendemain, au matin du 4ème jour sur le territoire Turkmène, on prend la direction de l’Ouzbekistan. Après 25 km de route assez agréables malgré la chaleur (le vent de face à au moins l’avantage de nous rafraîchir et il est souvent plus agréable de rouler que de rester statique !) nous arrivons au poste de frontière fermé pour cause de pause déjeuner. Nous demandons à cuisiner avec notre réchaud à essence pendant la pause. Le douanier n’est pas vraiment chaud au début (en même temps on sort quand même une bombonne d’essence avec une tête de mort dessinée dessus, un briquet et nos opinels juste devant le poste frontiere ce qui n’est pas très malin !) mais finalement il se doute bien qu’à vélo et par cette chaleur on a besoin de se nourrir et il finit par nous emmener à l’écart des caméras ou on peut cuisiner tranquille. L’occasion de discuter un peu plus longuement avec cet étudiant en sport et tourisme actuellement en service militaire forcé de deux ans. Il parle un anglais impeccable et je sens dans son regard l’envie lorsque nous lui racontons notre voyage. On passe ensuite les douanes sans aucuns problèmes, les douaniers sont adorables et comme à chaque poste de frontière ils jouent avec le canard/sonnette de Cécile. Conseil aux cyclos : une sonnette rigolote : imbattable pour faire rire les enfants et dérider les douaniers !


On quitte cet étrange pays avec un sentiment mêlé : un peu de regret de ne pas avoir pu rencontrer plus de turkmènes et de ne pas vraiment avoir pu comprendre dans les détails leur manière de vivre et en même temps un soulagement de quitter la chaleur Turkmène et l’excitation de (re)découvrir l’Ouzbekistan, sûrement le pays le plus mythique de la route de la soie. On gardera finalement une image très positive des turkmènes, joyeux, chaleureux, accueillants. En fait, en dehors de la capitale où s’exprime toute la mégalomanie du président, le pays semble normal, juste un peu trop désertique !